Échos d’Après

Ça recommence. C’est toujours pareil. Je ne peux vraiment pas vous laisser seule une minute n’est-ce pas ? C’était quand la première fois ? Il y a un an ? Deux ans ? Moi, je m’en souviens comme si c’était hier. L’Empire n’a jamais pris fin. Il me suffit juste de fermer les yeux. Essayez, vous verrez, c’est comme si vous y étiez. Nous passions une bonne soirée. Le bruit de l’alcool nous avait fait oublier l’odeur de la danse. La douceur âcre de la fumée m’avait fait oublier la poisseur de votre peau. Le bruit de vos yeux couvrait la musique. J’avais perdu pied. Je me noyais. Un verre ! Un autre ! Un dernier shot ! Nous étions sorti ensemble. Prendre un peu l’air, qu’on disait… Nous avions marché, alors. On rigolait. On s’amusait. Nous étions dans votre lit. Ou le mien. Qu’importe. Je m’étais finalement endormi.

Je ne me suis jamais réveillé. Et vous recommencez. Qu’est-ce que vous lui trouvez de plus que moi, à ce bonze ? C’est son regard, c’est ça ? Remarquez, il est plutôt beau gosse. Pauvre type. Vous le savez, n’est-ce pas, qu’il est marié ? On ne voit que ça, son alliance dans sa poche. Une de plus.  Elle n’en saura jamais rien. Mallou non plus, n’en a jamais rien su. La pauvre a dû se faire un sang d’encre. Des disparu, il y en a tous les jours, qu’il lui avait dit, le flic. Faut pas s’alarmer ma p’tite dame. Il a probablement pris la tangente avec une autre. Il vous a jamais parlé d’un endroit où il voudrait aller ? Et elle qui avait cru se souvenir. C’est vrai que j’ai toujours rêvé de vivre à l’étranger. Mon rêve a fait long feu.

Tiens donc, il vous a lâché ? Moins con qu’il n’en a l’air celui là. A qui le tour alors ? Vous vous foutez de moi ? Le binoclard, là ? Il pue encore la crise d’acné. Qu’est-ce qu’il fait dans la vie, celui-ci ? Étudiant en droit peut-être ? Non, il a plus une tête de matheux. Plutôt un deuxième année de médecine. Faudrait qu’il fassent quelque chose. On laisse rentrer n’importe qui maintenant, dans ce bar. Le pauvre, il n’en mène pas large. Il doit se croire au paradis. Il danse bien par contre. Ça on peut lui reconnaître. C’est souvent les laids qui dansent le mieux. À croire qu’ils ont quelque chose à se reprocher. Vous lui sortez le grand jeu ce soir ! Voilà qu’il vous accompagne prendre l’air. Au moins, lui ne manquera a personne.

Je vois déjà venir la suite. D’abord vous allez parler. Vous lui raconterez une autre de vos journées passionnantes. Il vous observera religieusement. Vous serez un peu fatiguée. Un petite marche vous requinquerait. Mais c’est que vous avez peur, les rues ne sont pas sûres à cette heure. Alors il vous proposera de vous accompagner. Il ne sentira pas votre petit sourire en coin, quand vous l’embrasserez. Juste une fois. Juste un petit peu. Pour le remercier.

Il est timide le bougre ! Regardez comme il est rouge. Presque autant qu’une vodka Tagada. Bref, Tagada vous suivra, comme un petit chien. Vous ferez des détours. Vous le perdrez. Sommes nous encore dans le cinquième ? Non, c’est trop chicos. Nous devons être arrivés dans le quinzième. Il est impressionné. Vous avez froid. Ça tombe bien, vous n’êtes pas loin de chez vous. Il montera bien pour un dernier verre au chaud, non ? Quel palace ! Tout est à vous ? Bien sûr que non, du-con, c’est la résidence secondaire du nonce apostolique ! Quel crétin celui-là tout de même. Vous pourriez être un peu plus sélective. Ç’en est vexant à la fin. J’était quoi, moi ? Un imbécile de plus ? Un chien perdu ?


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